Supporters : et si l'exemple venait de la Suède ?
Aux prises avec les mêmes problèmes qu'en France, les associations de supporters de Suède ont décidé de répondre rapidement aux mesures liberticides mises en place dans la patrie de Strindberg. Une démonstration de force susceptible d'être reproduite en France ?
AIK - Djurgarden, c'est ce qui se fait de plus chaud en terme de derby suédois. Les deux clubs du nord et de l'est de Stockholm entretiennent une rivalité qui s'exprime à travers les équipes de football, de hockey et d'handball de ces deux institutions omnisportives.
Cependant, le 19 septembre dernier, les deux tribunes si souvent opposées ont décidé de s'allier pour protester contre les mesures prises à l'égard des supporters, la Football Association de Suède ayant décidé de pénaliser les associations de supporters dont les membres seraient pris la main dans le sac en possession d'engins pyrotechniques à l'intérieur du stade.
La Black Army, supporters de l'AIK, justifie cette opération afin de démontrer l'importance de sauvegarder une culture des tribunes passionnée et positive et de protester contre ceux qui s'attaquent au football et à ses adeptes.
Ainsi, les dix premières minutes furent couronnées d'une chape de plomb, les 24 000 supporters présents (et surtout le kop situé derrière le but et le parcage visiteurs) ayant décidé de se taire afin de protester contre ces mesures. Au retour des vestiaires, plus d'une cinquantaine de torches fut craquée, comme un pied de nez aux mesures répressives concernant leur utilisation. Un épais brouillard a alors envahi la pelouse nécessitant l'interruption du match durant moins de 10 minutes. Il est intéressant de constater que les commentateurs, d'abord amusés et enthousiasmés par la rupture du silence, retournent leurs vestes lorsque les fumigènes sont enclenchés. Il faut dire que qualité de l'image retransmise et brouillard ne font jamais bon ménage...
EN QUOI CETTE ACTION NOUS SEMBLE INTERESSANTE ?
Elle est d'abord judicieusement menée. Les banderoles sont les objets de contestation les plus fréquemment utilisés dans les tribunes. Malheureusement, souvent les kop se situent derrière les buts, là où les caméras ne s'attardent que peu fréquemment. Il ne faut jamais oublié que la télévision est un média qui a peur du vide. En imposant leurs présences silencieusement, les associations de supporters ont sû attirer l'attention de manière pacifique sur leur message : sans ambiance, le football n'a pas la même saveur.
Décalé de quelques minutes le coup d'envoi des chants permet également un important "ascenseur émotionnel". Passer d'un silence mortifère à des chants puissants, c'est l'assurance d'être à la fois remarqué et de compter sur la frustration des troupes des tribunes qui ne désirent qu'une chose : encourager leur équipe. Ce type d'opération avait déjà été mise en place en France en 2008, plus précisément à Bollaert lorsque le RCL allait mal afin de faire réagir l'équipe. Jamais la "Lensoise" n'avait alors aussi bien résonné dans le stade, galvanisant joueurs et tribunes.
Le second intérêt de cette opération, c'est que supporters de l'AIK et de Djurgarden ont pris conscience de la gravité de la situation. En s'alliant de circonstances et en laissant de côté les petites rivalités, ils ont sû se coordonner pour opérer intelligemment et collectivement. Un exemple qui devrait être suivi en France ou aucune fédération des supporters n'existe et où chacun préfère la jouer solo que collectivement. On le répète, le salut des supporters de football français passe par plus de fédéralisme. Ce n'est pas sur le terrain médiatique que cela pourra se jouer puisque les médias, par leurs raccourcis simplistes (fumi = feu = danger) et la nécessité d'une retransmission de qualité s'opposeront à la sauvegarde de cette culture qu'ils considèrent de toutes façons comme un folklore desuet. Même son de cloche du côté économique où il sera toujours plus profitable d'accueillir des spectateurs que des supporters.
90 personnes furent interpellées à la suite de cette action pourtant pacifiste (aucun heurt, aucun fumi n'a servi de projectile...). La plupart sera certainement IDS "Interdiction de stade". Une opération qui en vaut la chandelle ?
Ce genre d'actions coup de poing doit faire réflechir. Face aux pouvoirs publics à la solde d'un changement économique des tribunes et aux diffuseurs plus que jamais propriétaires du football, les associations de supporters doivent lutter avec les armes qu'elles possèdent : le nombre, la passion et l'originalité de leurs interventions.
source : http://www.moustachefootballclub.com/articles/2011/9/supporters-:-et-si-l-exemple-venait-de-la-suede--.html