Bernard Serin : « Des travaux indispensables ! »
Adieu le Grand stade, vive Saint-Symphorien ! Le président du FC Metz propose une rénovation, à prix sage, de l’enceinte historique. Une nouvelle tribune sud et plus de 30 000 places sont en vue.
Dans la course à l’Euro-2016, qui s’est finalement mal terminée, on évoquait un Grand stade à Metz. Qu’en est-il aujourd’hui ? « Soyons clairs : je ne suis pas pour, le FC Metz et moi-même n’ont jamais été pour. En revanche, la rénovation de Saint-Symphorien est devenue indispensable. »
DOSSIER
• Pourquoi abandonner cette idée de stade flambant neuf ? « Un tas de raisons… Les Grands stades font rêver toutes les villes de France. Ce rêve s’est parfois transformé en cauchemar comme au Mans. Cela peut aussi devenir un mal vivre à cause des finances à Lille ou à Nice où le rêve n’est pas, je crois, tout à fait au rendez-vous. Il y a enfin des rêves qui sont d’actualité. A Lyon, plus de 100 millions d’euros proviendront du privé… »
• Le neuf est-il vraiment plus onéreux qu’une rénovation ? « Prenons un stade d’une capacité de 30 000 places. »
• Pourquoi ce chiffre ? « C’est la jauge UEFA qui permet d’accueillir les compétitions internationales et les coupes d‘Europe. Sans aucune fantaisie, on arrive à 150 millions ! Comment financer une telle somme alors que les collectivités territoriales se débattent avec de gros problèmes au niveau des investissements ? »
« 35 millions »
• A combien s’élèverait votre rénovation ? « 35 millions. Un projet raisonnable qui répond aux besoins du FC Metz. »
• On comprend la nécessité de rénover la triste et vieillotte tribune sud mais pourquoi maintenant ? « J’en ai déjà parlé à Jean-Pierre Masseret (le président de la Région). Dans le chapitre 3 du Pacte Lorraine, il est prévu 40 millions pour créer des équipements capables d’organiser des événements internationaux. Je crois comprendre que l’on peut y arriver avec la Ville de Metz et le conseil général de la Moselle. »
• Un partenariat public-privé est-il une méthode de financement possible ? « Pour le FC Metz, je ne pense pas. La relation entre l’exploitant et le club résidant est une source de conflit permanent. »
• Dans quelle mesure ? « Il existe un profond décalage entre les loyers dont le club résidant doit s’acquitter et les recettes enregistrées au stade. Un exploitant, qui souhaite proposer des spectacles par exemple, demande de libérer les installations 72h avant et 48h après, soit cinq jours. Or, les matchs ont souvent lieu le week-end. On en arrive donc à une semaine occupée. Or, il nous faut bloquer des dates pour la coupe de France, la coupe de la Ligue, l’Europe. Lille, qui accueillera le tennis avec la coupe Davis, reportera son match de foot. Une boîte à spectacle peut être magnifique mais ingérable. »
• Pourtant, Lille est souvent cité en exemple ! « Je me suis renseigné. Le club gagne à peine plus d’argent qu’à Villeneuve-d’Acsq où le Stadium contenait 19 000 places. Pour digérer le loyer, le LOSC doit au minimum être à plus de 30 000 spectateurs par match. Le Mans fonctionne avec un partenariat public-privé. Il est fragile et artificiel avec des salons VIP qui sont remplis par les 24h auto ou moto. »
« Les recettes sont marginales »
• Vous êtes en train de nous dire que le foot ne fait pas recette… « Les recettes sont marginales alors qu’un loyer peut étrangler un club. »
• En Allemagne, les clubs y arrivent… « Un spectateur moyen, dans ce pays, dépense 55 euros par match, place comprise. En France, c’est 25. Sur une base de 30 000 supporters et 19 matchs, on arrive à une différence de 18 millions par saison. »
• Il faudrait vendre plus de bière ! « Sans inciter à boire plus, c’est ça… La loi Evin nous autorise une vente sur 10 matchs, pourquoi pas 19 ? On fait tout pour diriger le supporter en dehors du stade. Et de nos jours, la tarification sociale, née du mode associatif, ne correspond plus à la qualité d’un spectacle aujourd’hui planétaire. »
• Vous voulez augmenter les tarifs ? « Mais ils sont faibles ! Derrière le but, on est à 200 euros, 150, voire 100 en cas d’ancienneté, soit 5 euros le match. C’est le tarif d’une rencontre amateur entre Audun et Villerupt. Là , on propose Marseille ou Paris… La billetterie est 50 % plus élevée en Allemagne. »
• Le FC Metz ne peut donc pas se payer son stade ? « Non, n’importe quel club français est dans ce cas. »
Alain THIÉBAUT.
Une quatrième et vraie tribune…
La tribune sud de Saint-Symphorien, vieille et inadaptée au football moderne, est devenue un frein à la progression du club. Photo Anthony PICORÉ
En piteux état, l’actuelle tribune sud bloque le développement économique et donc sportif du FC Metz. La nouvelle, non seulement doublerait l’accueil des spectateurs mais offrirait aussi bien d’autres atouts.
Etat des lieux
Saint-Symphorien ? C’est tout l’union du moderne et du très ancien… Un simple coup d’œil, quand vous êtes sur l’autoroute, vous permet de constater l’horrible contraste entre les tribunes. La "sud" choque! Un extérieur ridicule, « très abîmé » , selon le président Bernard Serin, et un intérieur dévasté que l’on a relooké tant bien que mal. « Elle a cinquante ans, est obsolète ».
Faute de surfaces suffisantes, les jeunes ramasseurs de balles n’ont pas de vestiaires (imaginez quand il pleut), les journalistes travaillent dans des conditions délicates, leur bungalow prenant régulièrement l’eau. Les toilettes posent problème. La pluie s’infiltre dans le bureau du cabinet médical. Une tôle a été posée pour canaliser l’eau qui finit dans l’évier. Les bureaux des officiels ont la taille d’un cagibi. Les arbitres masculins ont leur pièce, pas les dames.
C’est donc tout le cœur du FC Metz qui pulse dans un environnement étriqué et plus du tout adapté aux exigences modernes : impossible de proposer une zone mixte pour les médias ou un lieu des contrôles antidopages décent. En tribune, la corbeille des invités affiche seulement un charme désuet. Orpheline de salles ou de salons, l’installation constitue simplement un frein au développement économique.
Un outil de travail
« On ne peut plus rien faire » , déplore Bernard Serin. Vrai. Sans pousser aux dépenses, l’évidence s’impose. Il est urgent de raser ce béton commençant à se fissurer et d’ériger un quatrième pan digne des trois autres afin que l’image du canard boiteux disparaisse.
Le FC Metz prévoit une tribune sud de 7 500 places. La capacité de Saint-Symphorien serait donc portée à « un peu plus de 30 000 » , selon son dirigeant. « On ferait une tribune la plus large possible sensiblement de la hauteur de la tribune ouest. Il y aurait une partie haute et une partie basse, avec au centre une corbeille officielle et des loges des deux côtés. L’espace réceptif serait plus important avec des salons et des terrasses. Au rez-de-chaussée, on aurait enfin un véritable outil de travail fonctionnel. »
Angles morts et plus de toit
L’image du stade rêvé pour l’Euro-2016 est donc à jeter aux oubliettes. Le projet-2014 « très raisonnable » ne prévoit ni de toit unissant les quatre tribunes ni d’angles fermés : « La raison en est simple , explique Bernard Serin. Dans un angle, il n’y a pas de places possibles dans le bas du triangle. Personne n’en veut, sauf trois ou quatre fois dans la saison. Or, ces emplacements ont le prix de revient le plus élevé. Leur construction est très chère. On peut me rétorquer qu’une ola, c’est mieux avec des tribunes dans les angles, je ne vais pas mettre en péril des finances pour ça ! » D’ailleurs, dans le projet précédent, seuls deux angles étaient concernés, les deux autres devaient être des bureaux privatifs. « Nous ne sommes plus obligés de respecter le cahier des charges de l’Euro-2016. L’important est d’avoir une tribune à un prix sage. » Un credo qui entraîne aussi la disparition d’un toit uniforme. Le beau est gourmand en monnaie : « Il faudrait mettre à niveau les tribunes, repenser l’éclairage… »
Accès et parking
En revanche, si le président Bernard Serin se refuse pour l’instant à évoquer d’autres informations, il se murmure que le FC Metz a plus que jamais en tête l’amélioration des conditions d’accueil du public. Allons-nous vers une modification des voies d’accès et une création de parkings ? Ce serait extrêmement souhaitable pour atténuer, par exemple, le danger d’un engorgement A31-centre ville surchargé les soirs de matchs. Chaque chose en son temps, sans doute. D’abord, l’impératif de la tribune sud. « On aurait alors un stade très convenable pour de grandes rencontres, affirme le n°1 du FC Metz. Saint-Symphorien, qui est historique pour avoir abrité les premiers matchs professionnels en France, reprendrait toute sa valeur ».
A. T.
Jean-Pierre Masseret : « Il y a une possibilité »
La parole aux trois collectivités territoriales concernées par le stade Saint-Symphorien.
Le président de la Région lorraine, pour ceux qui l’auraient oublié, est un passionné de sport (ancien champion d’athlétisme). On ne s’étonnera donc pas qu’il suive aussi bien l’actualité du football : « Les décideurs, que nous sommes, feraient bien de se pencher sur le dossier de la Ligue 1 qui pourrait être réformée. Si le nombre de clubs passe à dix ou douze, on pourrait se retrouver en Ligue 2. Serait-il alors opportun d’investir à ce point dans un tel équipement ? »
Deuxième précaution posée par Jean-Pierre Masseret : « Le conseil régional n’a pas directement vocation à intervenir dans ce genre de dossier. » Néanmoins, le président de la Région ne peut échapper à la réalité du Pacte Lorraine : « L’État a intégré une troisième partie dans ce pacte que j’ai signé, une ligne budgétaire, sur les événements sportifs si on peut les appeler ainsi. Il est donc important de savoir si l’État veut en consacrer une partie à ce sujet. »
Si l’affaire est techniquement possible, Jean-Pierre Masseret reconnaît que le stade Saint- Symphorien n’a pas « été identifié en tant que tel. Il s’agissait de l’aménagement BA 128. » Entre deux projets, l’un est-il de trop ? « Cela ne pourra pas se faire des deux côtés. Si l’on donne à un endroit, on ne pourra pas le faire ailleurs. Ce serait un mensonge de prétendre qu’une collectivité est capable d’investir dans les deux domaines. »
En tout cas, le président lorrain serait plutôt d’accord pour la rénovation de Saint-Symphorien : « Si l’État est prêt, mais je ne prendrai pas sa part, la possibilité existe aux alentours d’une dizaine de millions. Il faut voir comment on peut calculer tout ça. »
Patrick Weiten : « Une tribune obsolète »
La rénovation du stade Saint-Symphorien est à l’étude, on suppose que vous êtes au courant… « Bien sûr ! Et même depuis longtemps. À l’époque, on avait tout fait pour que Metz rentre dans la course à l’Euro-2016. Nous avions conclu un accord avec David Douillet, ministre des sports en visite à Yutz pour une somme entre 8 et 10 millions. Nous étions aussi allés voir Noël Le Gréât (président de la fédération). »
• Ce nouveau projet retient-il votre attention ? « Il est équilibré. J’ai toujours dit que le conseil général serait un partenaire. Ce n’est pas une ambition personnelle mais le vote unanime d’une majorité départementale. »
• Le plan de financement ? « Je ne le connais pas. Mais le Pacte Lorraine prévoit 40 millions d’euros pour les infrastructures sportives à rayonnement régional. Ce serait une bonne chose d’en mettre 15 pour le stade et 25 pour la BA 128 de Frescaty. »
• Une entente des collectivités est-elle envisageable ? « Je n’ai jamais déterré la hache de guerre. Les sujets importants et sensibles doivent rassembler Région, Département et ville de Metz. Celui du FC Metz en est un. Le club ne peut pas vivre davantage avec cette tribune sud obsolète. Il faut au FC Metz des locaux pour son marketing, ses besoins sociaux, médicaux, économiques. Donnons-nous les moyens d’un équipement sur les quarante prochaines années. »
• Saint-Symphorien, une priorité ? « Il est tout aussi important que d’autres espaces culturels. Le FC Metz rassemble au minium 400 000 visiteurs chaque saison. Il mérite notre attention car il participe grandement à l’attractivité de Metz et son agglomération. Si on veut que son rayonnement se poursuive, la rénovation est indispensable. »
• Le budget sera-t-il facile à boucler ? Pour le projet de l’Euro-2016, on évoquait un financement du conseil général à hauteur de 10 millions. « On doit tous être prudent en politique d’investissement. Mais nous avons cette chance avec le Pacte Lorraine. Le financement est fléché. Nous avions pris part à l’élaboration de celui-ci. »
Belkhir Belhaddad : « On prendra notre part »
« La balle est dans le camp du FC Metz ! », pour Belkhir Belhaddad, adjoint aux sports de la ville de Metz. « Nous attendons que Bernard Serin finalise le projet que nous ne connaissons pas dans le détail et qu’il le présente à Dominique Gros car la Ville de Metz à laquelle appartient cet équipement, aura son mot à dire. »
N’y voyez pas un avertissement négatif. Belkhir Belhaddad rappelle que la municipalité a « investi 2,6 millions depuis 2010 entre la pelouse, la partie VIP de la tribune ouest, les diverses mises en normes de sécurité. Notre idée a toujours été de continuer à rénover notre stade. »
Faut-il comprendre que le financement coule de source… « Tout dépend du périmètre de la rénovation. Il faut voir à quoi cela correspond exactement. Nous savons que le Conseil général avait annoncé une aide de 10 millions. On prendra notre part et nos responsabilités le moment venu. » Porte municipale ouverte ? « Elle n’a jamais été fermée » , répond l’adjoint, récemment élu vice-président de l’ANDES (Association Nationale des Élus en charge du Sport) et donc en contact étroit avec le nouveau secrétaire d’état chargé des sports, lui-même ancien adjoint à Lyon. « On a évoqué le Pacte Lorraine qui prévoit 40 millions. Il est prêt pour une réunion de travail pour peu que les projets régionaux tiennent la route. » Parmi eux, le stade Saint-Symphorien.
Au fait, 35 millions, est-ce la mer à boire pour une Ville qui a retoqué le projet de l’Euro-2016... «Encore une fois, il faut voir ce que l’on a pour cette somme. Après, on n’est pas dans la position : on fait ou on ne fait pas. On ne choisira pas entre le stade et le palais des congrès. Je le redis ; on prendra notre part. »
A. T.
Deux saisons de chantier ?
L’arrivée en Ligue 1, la réussite sur le terrain, l’engouement populaire, l’opportunité du Pacte Lorraine (contrat État-Région) qui prévoit des subventions possibles pour la création d’équipements, il faut battre le fer pendant qu’il est chaud. On peut supposer qu’une décision définitive devrait rapidement arriver. « Je pense que les choses vont évoluer dans les deux prochains mois » , confirme Bernard Serin. En cas d’accord entre le FC Metz et les collectivités territoriales (Région lorraine, département de la Moselle, Ville de Metz qui est, ne l’oublions pas, propriétaire du stade), il faudra quand même s’armer de patience pour voir le nouveau Saint-Symphorien. « Le plus tôt sera le mieux car ensuite, les démarches administratives (appel d’offres, etc...) peuvent prendre un an. Quant aux travaux, ils impacteraient deux saisons sportives. Nous serons alors obligés de penser à des structures provisoires » , pour remplacer cette tribune sud.
par Wilgars » 07 Oct 2014, 12:00 
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par Carlton » 04 Jan 2015, 04:41
