Nouveau stade de Bordeaux : comment attirer les spectateurs ?
Thomas Held, qui dirige une entreprise de conseils et gestion de billetterie, affirme que "l'accueil et les contenus extra-sportifs" sont et seront indispensables pour remplir les nouvelles enceintes comme celle de Bordeaux
La tendance est patente depuis plusieurs années : les stades de foot, en France, sont de moins en moins garnis les soirs de match. De 75,4% en 2006/2007, le taux de remplissage moyen est descendu à 70,6% la saison dernière. Et Chaban-Delmas, avec seulement 19 197spectateurs de moyenne depuis le début de la saison, ne possède que le troisième plus faible taux en la matière.
C'est dans la lutte contre ce phénomène que "eForSports" trouve sa source. Cette start-up parisienne, fondée par Thomas Held en septembre 2011, propose aux organisateurs d'évènements (donc les clubs de foot) de les conseiller et d'intervenir dans leur pôle billetterie, voire même de les gérer.
Aujourd'hui, son entreprise collabore avec une trentaine de clubs sportifs, dont le LOSC à Lille, l'un des quatre clubs français qui se dotent d'un nouveau stade pour l'Euro 2016 (avec Bordeaux, Nice et Lyon). Pour lui, pas de doute : le remplissage de ces enceintes passe par une proposition d'activité plus large que le simple spectacle footballistique.
"Sud Ouest" : Quelle est votre méthode pour remplir un stade ?
Thomas Held. Il faut définir le bon prix, le bon public, les bons moyens de distribution et de promotion. Par exemple, depuis très longtemps les organisateurs vendent leurs billets sur des réseaux types Fnac ou Ticketnet. Le ticket est vendu sans que l'on connaisse la personne. Nous, on incite à vendre soi-même ses billets, sur son propre site internet, pour qu'un club puisse se constituer une base de données et que, pour les prochains évènements, il soit capable de solliciter ces gens-là avec une offre ciblée.
Mais peut-être que les clients n'ont pas envie de venir à chaque fois ni d'être intégrés à une base de données...
On ne les contacte qu'au nom de l'entreprise à laquelle ils se sont adressés. Par exemple, si vous achetez un billet pour les Girondins, on ne va pas vous envoyer un mail pour vous proposer une place pour l'UBB. Alors que sur Ticketnet par exemple, si vous achetez une place pour un concert, le lendemain vous recevrez une newsletter sur des manifestations qui n'ont rien à voir avec votre concert. Par ailleurs, une fois que vous avez intégré la base de données sur les Girondins par exemple, vous pouvez refuser d'être sollicité.
Quelle est la stratégie "moderne" pour garantir le remplissage ?
Il y a un gros enjeu sur la gestion de la relation-client. On compile toute les données qui concernent le spectateur et on essaie de les exploiter, à la manière de ce qui se fait dans les call-center aux États-Unis pour le football américain. Et il faut être capable d'apporter de la prestation de service au spectateur. Dans les mails, il ne faut pas seulement vendre ; il faut aussi apporter des contenus privilégiés : changement d'heure pour le match, les compositions d'équipe, comment venir au stade... On fait aussi des animations, musicales par exemple.
On dépasse le cadre du simple spectateur de foot, on est là dans un cadre très incitatif...
Notre activité n'est pas la seule qui soit nécessaire au remplissage d'un stade. Il y a des pré-requis : un stade qui tient la route, une équipe performante, un bon accueil via des parkings par exemple, de la restauration... Quand ça marche bien sportivement, les gens viennent naturellement. Il faut profiter de cette embellie sportive pour capitaliser, engranger des données, fidéliser les clients au club pour que derrière, au moment où ça ira moins bien, ça amortisse les baisses de remplissage. Quand les résultats seront moins bons, la fréquentation va baisser, mais grâce à nous, elle baissera moins.
Est-ce qu'on est obligé de proposer des à -côtés pour faire venir des gens au stade ?
Quand on regarde les championnats qui réussissent, en Allemagne ou en Angleterre, on se rend compte que les gens ne viennent pas au stade que pour le foot. En Allemagne, il y a des cinémas, des zones commerciales, des parcs d'attraction. Ces activités-là amènent du monde dans le stade, et vice-versa. Il y a une partie des gens qui sont supporters, qui ne s'intéressent qu'à l'aspect sportif de leur club, mais la réalité, c'est que cette partie-là ne suffit en aucun cas à remplir un stade.
Il faut donc aussi des spectateurs, des gens qui viennent au stade pour se prendre au jeu. S'ils viennent une fois cette saison, il faudra qu'il viennent deux fois la saison prochaine, trois fois la saison suivante... jusqu'à s'abonner. Nous, on réalise des enquêtes, des études, justement pour savoir comment faire venir de nouveaux spectateurs. Ce qu'il en ressort, c'est qu'il faut une part d'accueil et de contenus extra-sportifs (accès à l'enceinte, animations...). Il y a aussi un gros problème sur la qualité de la restauration en France. Et l'enjeu de la sécurité peut être un facteur dissuasif.
Que pensez-vous du projet de grand stade à Bordeaux ?
Les architectes choisis ont réalisé l'Allianz Arena de Munich, c'est un gage de qualité. Après, le budget est inférieur à ceux de stades équivalents donc je ne sais pas si c'est un signe négatif... En tout cas c'est une super nouvelle pour la région car le stade pourra accueillir plein de spectacles sportifs et extra-sportifs.
Cela dit, côté foot, ça ne suffira pas. Il y a toujours un effet "pshiit" au moment de l'ouverture, une curiosité générale qui permet d'aller chercher des gens jamais venus à Chaban ou pas venus depuis longtemps. Le problème, c'est que ça doit durer, et pour ça il faut que l'accueil et les résultats sportifs soient satisfaisants.
Bon article, dommage que le gars ne connais pas le projet de Bordeaux parce que son commentaire est plus que réducteur.